De l'une à l'autre

De Amereida
De l'une à l'autre
Le temps des loups.png
TipoArtículo
EdiciónRevue trimestrielle Le temps des loups Nº 4/5, pp. 23-24: La Lune.
CiudadParís
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Louve : après nos routes — forêt de Crécy, bois de Penne du Tarn, clairières de la Bourgogne — par cent chemins, mords à belles dents !

Voici le jour venu. Car la « merde intellectuelle » dont parlait Artaud, s'est rangée de l'affût; plus de chasse pour leur pseudo coude à coude : théorie de la théorie de la théorie de la théorie ...

Pour nous : « Il faut être absolument moderne » ; au prix de n'importe quelle existence, voilà notre souffle.

Si la parole est la parole, dans la parole « vent », le vent y est — non seulement l'air qui court, mais le vrai vent, qui devient vent à cause de la parole. S'il y a le vent dans la parole, la parole est parole, et non mot par sa place dans un système. Nous n'avons rien contre les pièges à loup — à éviter.

Pendant notre chasse dans les déserts, les cochons mettaient bas ... Louve ! ni à gauche ni à droite ! Il n'y a pas de points cardinaux. Sois libre de toute référence. Jamais les chiens ne comprendront les loups.

Voici le jour venu. Lâchons-nous dans les villes, affamés.

Faire la révolution pour la justice, c'est l'imposture.

Faire la révolution pour le bonheur ou pour la joie, c'est le mensonge.

Faire la révolution pour accomplir l'histoire, c'est l'idiotie.

Faire la révolution pour l'homme, c'est l'onanisme.

Faire la révolution pour la liberté, c'est de la linguistique.

Nous n'avons ni justification, ni injustification.

Causes et buts, sciences et espoirs, savoirs et productions — autant de découpages qui respirent leur radicalité de restes : fonds de latrines ( en toute impartialité et sans offense). C'est çà, c'est l'efficacité. Pain et vin, ils le lisent faim et soif.

Lâchons-nous sur les villes, brûlons tous -les « textes », de Samarcande à Paris, et de Paris à Tahiti — abandonnons cette île, telle quelle, à ses jeunes marchands de gloires et de méfaits. On ne fait pas, on ne défait pas la révolution. La vie est poétique ou servile. Pour n'importe quel pouvoir, quelle ruée de domestiques ! Le loup ne peut vivre qu'à l'ouvert.

Notre haleine sacre tout verbiage (même celui de la révolu­tion) ; le loup ne revient jamais sur ses pas.

Eux, les voilà qui ont trouvé les os de notre Renard Artaud. Ils les rongent. Depuis si longtemps qu'ils n'ont pas de parole, ils ne sont plus que producteùrs de mots. Pour défendre leur boutique, ils tirent brièvement avec le pistolet d'alarme a: Anti­-petitbourgeois ».

Quant aux autres, les hommes, ils sont toujours la majorité, comme d'habitude, mourants assassins.

Louve ! Voici le jour venu.

Ramasse tout. Aujourd'hui, il n'y a plus ni bons ni mauvais poètes ; il y a ceux qui veulent, et ceux qui ont dans leur sang la poésie. Ce sont nos loups.

Lâchons-les — de toutes races et de toutes sortes — sur la ville. Pas de fuite. Nous n'allons pas à la lune — nous venons d'elle.